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      Haro sur les cautions disproportionnées !

      Tribune publiée le 13 février 2013 par Nicolas DISSAUX
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      Un récent arrêt de la Cour de cassation précise le champ d’application de la responsabilité pour cautionnement excessif. L’auteur, défenseur des franchisés, commente cette décision qui, selon lui, concerne également le monde de la franchise.

      Issu de la loi du 1er août 2003 sur l’initiative économique, l’article L 341-4 du Code de la consommation dispose qu’« un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ».

      Lorsque ce texte n’est pas applicable, la caution n’est toutefois pas totalement démunie. Le célèbre arrêt « Macron » l’invite alors à solliciter les règles de la responsabilité civile (1). L’effet n’est certes pas le même : les dommages et intérêts qui seront éventuellement octroyés à la caution peuvent ne réduire qu’une partie de son engagement, là où le texte consumériste aboutit à sa paralysie totale. Le moyen peut néanmoins s’avérer plus efficace : tandis que l’article L 341-4 n’exclut pas totalement les poursuites dès lors que le patrimoine de la caution, au moment où celle-ci est appelée, lui permet de faire face à son obligation, la mise en œuvre de la responsabilité du créancier prive ce dernier, définitivement, de tout ou partie de sa garantie.

      Le créancier aurait manqué à son devoir de mise en garde

      L’arrêt du 2 octobre 2012 (2) revêt ainsi une indéniable importance en ce qu’il précise les conditions de cette mise en œuvre. En l’espèce, la compagne d’un commerçant s’était porté caution des engagements souscrits par sa moitié auprès d’un fournisseur. Ce dernier étant défaillant, la caution était appelée. Et c’est pour se soustraire à son engagement qu’elle invoquait la faute du créancier, lequel lui aurait fait souscrire un cautionnement disproportionné par rapport à ses ressources. La Cour d’appel de Grenoble fait droit à cette demande : selon les magistrats du second degré, le créancier aurait manqué à son devoir de mise en garde. Le pourvoi formé par le créancier fournisseur est rejeté.

      La Cour de cassation estime qu’ayant fait ressortir que le fournisseur « était un créancier professionnel, sa créance étant née dans l’exercice de sa profession, et que la caution, fût-elle intéressée par les fruits de l’entreprise, ne pouvait être considérée comme avertie, dès lors qu’elle n’était pas impliquée dans la vie de l’entreprise, la cour d’appel a pu en déduire que le créancier avait commis une faute en faisant souscrire à la caution un engagement disproportionné, abstraction faite de la référence erronée mais surabondante au devoir de mise en garde ».

      Un franchiseur pourrait constituer un « créancier professionnel ».

      Ce faisant, la Cour de cassation précise le champ d’application de la responsabilité pour cautionnement excessif. Elle le précise tant à raison de son objet que de ses sujets. Sur le second point, la haute juridiction livre une interprétation extensive et bienvenue des notions de « créancier professionnel » d’une part ; de « caution non avertie » d’autre part. Le premier désigne tout créancier dont la créance est née « dans l’exercice de sa profession ». En clair, il n’est pas question de l’assimiler aux seuls établissements de crédit. Un franchiseur, donc, pourrait constituer un créancier professionnel.

      Quant à la caution, le seul fait qu’elle soit intéressée à la prospérité du créancier principal ne suffit pas à la rendre « avertie ». La Cour de cassation ne donne ici aucune définition positive. Sans doute entend-elle néanmoins réduire la catégorie aux cautions versées dans les affaires qui témoignent d’une certaine compétence.

      A cet égard, l’arrêt du 2 octobre 2012 intéresse donc naturellement le monde de la franchise : souvent, le financement du candidat à l’intégration du réseau exigera en effet la caution de son conjoint ou de son compagnon.

      (1)Cass. com., 17 juin 1997 : n° 95-14.105

      (2)Cass. Com., 2 octobre 2012 : n° 11-28.331, Publié au bulletin