Fermer
Secteurs / Activités

      La franchise fait-elle perdre leur identité aux centres-villes ?

      Tribune publiée le 14 mai 2010 par Gilles THIRIEZ
      En savoir plus sur l'auteur

      On reproche souvent à la franchise d’avoir uniformisé nos villes, notamment les centres-villes. L’auteur livre ici son opinion sur la question, rappelant au passage les responsabilités d’autres acteurs économiques et politiques. Et le rôle positif de la franchise dans la modernisation du commerce de nos cités.

      La franchise a redynamisé les centres-villes, c’est indéniable. Avec une conséquence que beaucoup de Français déplorent : une perte d’identité de ces centres-villes, par suite de la similarité des magasins franchisés d’une ville à l’autre. Comment en est-on arrivé là ?

      Tout d’abord, les concepts de franchise nous sont venus essentiellement des Etats-Unis, où la conformité des magasins d’une même marque, d’une ville à l’autre, était la règle. Ce sont des franchises verticales, hiérarchiques, dans lesquelles le franchisé doit appliquer à la lettre un concept élaboré dans ses moindres détails. Il faut dire que les Américains, en général, quand ils se déplacent, ont besoin de retrouver leur environnement : ils préfèrent aller dans des hôtels identiques à ceux qu’ils ont chez eux, avec les bouteilles de Coca et d’eau minérale certifiées, leur fast-food, etc.

      Ensuite, cette uniformité a été rendue possible par un laissez-faire des mairies, qui, trop heureuses de voir des grandes enseignes venir au secours de l’activité commerciale de leur centre-ville, ne leur ont pas imposé les normes architecturales qui auraient préservé l’originalité de leurs cités.

      Heureusement, au 21ème siècle, on trouve chez certains franchiseurs, même les plus grands, un souci d’adapter leur concept aux conditions locales, et une reprise en mains par les mairies de l’architecture urbaine.
      Cette diversification concerne les aspects visuels, mais également l’offre-produits. Ainsi, par exemple, une des meilleures « soupe aux choux » à Porto (Portugal) est, à mon avis, celle proposée par McDonald’s !

      Il est évident que certains petits commerces ont été obligés de quitter le centre-ville à cause du renchérissement, souvent rapide et excessif, des pas-de-porte. Cette inflation des prix a été initiée par le développement des franchises, mais accélérée par les établissements bancaires, qui se sont arrachés à prix d’or les meilleurs emplacements.

      La franchise a également « tué » certains commerces vieillissants, qui, de toutes façons, auraient fini par disparaître car incapables d’évoluer avec les besoins des consommateurs. On dit souvent, avec raison, que la clientèle d’un magasin est à l’image du commerçant : les personnes âgées vont vers les commerçants âgés, les jeunes vers les jeunes. Il se trouve, et ce n’est pas un hasard, que les franchisés sont plutôt jeunes et dynamiques.

      En contrepartie, la franchise a relancé un certain nombre de concepts de commerce de centre-ville, par exemple : les magasins d’alimentation, boulangeries, fleuristes, salons de coiffure, etc. Sans la franchise, ces concepts seraient morts, et à jamais perdus pour les consommateurs.

      Remarque complémentaire : l’homogénéisation des centres-villes (est-ce un bien ou un mal ?, qu’en pensent les consommateurs, les sociologues ?), si elle a été initiée par la conquête de ces espaces par les franchises, elle a été développée également par d’autres acteurs (car il n’y a pas que des commerces dans un centre-ville) : les banques, les grands promoteurs immobiliers, les constructeurs de bus et tramways, les services d’urbanisme, etc.