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      Ventes sur Internet : l’Europe se prononce

      Tribune publiée le 29 novembre 2011 par Jean-Baptiste GOUACHE
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      Le franchiseur peut-il empêcher un franchisé de diffuser les produits ou services contractuels en utilisant Internet? La Cour de justice des Communautés européennes a rendu sur cette question un arrêt significatif, selon l’auteur.

      Le règlement européen d’exemption n°330-2010 du 20 avril 2010 est muet sur la question de l’exemption des clauses prohibant l’usage de l’Internet au distributeur.

      Toutefois, toute restriction des ventes passives, i.e. non sollicitées, est exclue du bénéfice de l’exemption par catégorie. Or les ventes sur Internet sont assimilées à des ventes passives en droit de la concurrence.

      Les nouvelles lignes directrices (Point 52) exigent que chaque distributeur soit autorisé à vendre sur Internet. La jurisprudence européenne vient de se fixer également dans ce sens.

      Le laboratoire Pierre Fabre interdit à ses distributeurs la diffusion sur Internet. Par décision 08-D-25 du 29/10/2008, l’Autorité de la concurrence (ADC) déclare cette pratique contraire aux articles L. 420-1 du Code de commerce, et 101 TFUE. PIierre Fabre saisit la Cour d’appel de Paris d’un recours contre cette décision. Le 29 octobre 2009, celle-ci sursoit à statuer et pose à la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) une question préjudicielle :

      « L’interdiction générale et absolue de vendre les produits contractuels sur Internet aux utilisateurs finals imposée aux distributeurs agréés dans le cadre d’un réseau de distribution sélective constitue-t-elle effectivement une restriction caractérisée de la concurrence par son objet au sens de l’article 81§1 du T CE échappant à l’exemption par catégorie prévue par le règlement n°2790/1999, mais pouvant éventuellement bénéficier d’une exemption individuelle en application de l’article 81§3 du TCE ? »

      L’arrêt de la CJCE vient d’être rendu (13 octobre 2011, C-439/09)

      La cour juge que « l’exemption par catégorie ne s’applique pas aux accords verticaux qui ont pour objet la restriction des ventes actives ou des ventes passives aux utilisateurs finals par les membres d’un système de distribution sélective opérant en tant que détaillants.

      « Une clause contractuelle interdisant de facto Internet comme mode de commercialisation a, à tout le moins pour objet de restreindre les ventes passives aux utilisateurs finaux, sans qu’Internet puisse être considéré comme « un lieu d’établissement non autorisé » au sens du règlement d’exemption. »

      Les franchiseurs doivent donc permettre de manière systématique à leurs franchisés d’utiliser l’Internet pour diffuser les produits ou les services contractuels s’ils souhaitent bénéficier de l’exemption par catégories.

      Pour autant, un nouvel équilibre doit se dessiner et le franchiseur doit pouvoir organiser la protection de l’image de sa marque et encadrer les conditions de diffusion de son produit par les franchisés sur Internet. Pour cela :

      • Le point 54 des lignes directrices permet au franchiseur d’imposer des normes de qualité pour l’utilisation d’un site Internet à des fins de vente de ses produits.
      • Le franchiseur peut contraindre le franchisé à ouvrir et exploiter un point de vente physique.
      • Les ventes actives du franchisé via Internet peuvent être restreintes: par exemple, prohibition contractuelle des e-mailings non sollicités de prospects situés en dehors de la zone d’exclusivité.
      • L’utilisation de la marque peut-être encadrée : charte graphique, architecture type de site Internet, prohibition de l’usage de la marque à titre de nom de domaine ou partie de nom de domaine, etc.

      Les clauses des contrats de franchise relatives à l’usage de l’Internet par les parties doivent donc désormais être détaillées, de sorte que cet usage soit suffisamment encadré pour que l’image de la marque demeure homogène, dans l’intérêt du réseau.

      Lire aussi sur le sujet :

      Ventes sur Internet : la Cour Européenne de Justice confirme qu’on ne peut pas les interdire.

      Hubert Bensoussan : les ventes en ligne à la lumière du nouveau règlement d’exemption