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      Clause de non-concurrence après le contrat jugée excessive : la Cour de cassation confirme - Brève du 7 mars 2022

      La Cour de cassation confirme un arrêt de la cour d’appel de Paris jugeant excessive une clause de non-concurrence post-contractuelle dans un contrat de franchise. Elle va encore plus loin en cassant la partie de l’arrêt qui condamnait le franchisé à s’acquitter malgré tout de redevances non payées et le déboutait de ses demandes d’indemnisation.

      Cour de cassation juridique franchisePar un arrêt du 16 février 2022, la Cour de cassation a statué à nouveau sur un litige opposant depuis des années un franchiseur et un de ses ex-franchisés. Au cœur du conflit : la clause de non-concurrence post-contractuelle imposant au franchisé pendant un an de s’abstenir de toute prolongation de son activité dans un rayon de 150 km autour de ses établissements.

      L’argumentation du franchiseur, expliquant que ce rayon d’action inhabituel était justifié par la nature même de son activité d’enseignement de l’informatique, avait dans un premier temps – en mai 2017 – obtenu l’assentiment de la cour d’appel de Paris.

      Saisie, la Cour de cassation avait, dans son arrêt du 28 novembre 2018, cassé cette décision, incitant la cour d’appel autrement composée à « rechercher si l’interdiction d’exercer » la même activité et de « s’affilier à un réseau concurrent » dans un rayon de 150 kilomètres autour de l’établissement « n’apportait pas une restriction excessive à la liberté d’exercice de la profession (du franchisé) ».

      Une clause au caractère « disproportionné et illicite »

      Dans son arrêt du 13 décembre 2019, la cour d’appel de Paris (Pôle 5, chambre 11) s’était alignée sur la Cour de cassation. Si les magistrats reconnaissaient que le franchiseur disposait d’un réel savoir-faire à protéger, la taille de la zone de protection interdisait en fait au franchisé d’exercer dans « un bassin important de population évalué par (le franchiseur lui-même) à 5 millions de personnes dont de nombreux étudiants». La cour concluait au caractère « disproportionné » et « illicite » de la clause et annulait en conséquence les indemnités auxquelles le franchisé avait été condamné en 2017.

      En revanche, elle estimait que le franchiseur avait eu raison de résilier le contrat pour non-paiement des redevances et condamnait le franchisé à s’acquitter en conséquence de la clause pénale de 72 000 € correspondant à une année de cotisation. De même, elle refusait ses demandes de remboursement du droit d’entrée (de 900 000 €) et le versement de plus de 5,5 millions d’euros correspondant selon le franchisé à sa perte de marge brute.

      Encore en litige : l’indemnisation du franchisé

      Devenir-Franchise-Etude-Marche-PrevisionnelsA nouveau saisie, la Cour de cassation confirme d’abord sans surprise la condamnation par la cour d’appel de la clause de non-concurrence post-contractuelle eu égard à son « caractère disproportionné ».

      Elle casse toutefois l’arrêt d’appel de 2019 sur le volet indemnisation du franchisé. Pour bien comprendre, il faut rappeler le fonctionnement de cette franchise. Le contrat signé en mars 2009 prévoyait qu’en échange du droit d’entrée du franchisé et de ses redevances mensuelles, le franchiseur apportait dans la corbeille son savoir-faire pédagogique et sa marque mais aussi qu’il collectait puis reversait au franchisé les droits d’inscription payés par les étudiants.

      Or, le franchisé conteste sa condamnation à verser 72 000 € de clause pénale pour non-paiement de ses redevances parce qu’il estime que de son côté le franchiseur lui devait des droits d’inscription qu’il ne lui avait pas reversés.

      Pour le franchiseur, approuvé en 2019 par la cour d’appel de Paris, le non-paiement des redevances, malgré une mise en demeure, justifiait pleinement la résolution du contrat à la date du 18 décembre 2019. Et donc la condamnation du franchisé.

      Ce n’est pas l’avis de la plus haute juridiction française pour qui la cour d’appel aurait dû « rechercher si, à la date de prise d’effet de la mise en demeure, la société franchisée détenait une créance réciproque certaine, liquide et exigible, au titre des droits d’inscription que devait lui reverser la société (du franchiseur…), de nature à éteindre par compensation sa dette ».

      La Cour ajoute que cette cassation partielle de l’arrêt d’appel « entraîne par voie de conséquence » celle des volets qui rejettent les demandes de la société franchisée « en résolution judiciaire des contrats aux torts de la société franchiseur et en paiement des droits d’entrée et de la perte de marge brute qui s’y rattachent par un lien de dépendance nécessaire ».

      L’affaire est donc à nouveau renvoyée sur ces points devant la cour d’appel de Paris « autrement composée ».

      Référence de la décision :

      Cour de cassation, civile, chambre commerciale, 16 février 2022, 20-12.885