Fermer
Secteurs / Activités

      Franchiseurs : comment protéger votre savoir-faire ?

      Tribune publiée le 19 mai 2008 par MELLINGER
      En savoir plus sur l'auteur

      Comment le franchiseur peut-il transmettre son savoir-faire aux franchisés et éviter qu’ils n’éprouvent l’envie impérieuse, à la fin du contrat, de l’exploiter seuls ou d’en faire profiter une chaîne concurrente ? C’est évidemment une question, dont les dernières décisions de la Cour de cassation en matière de clauses restrictives de concurrence, ont souligné l’importance. Spécialise reconnu, l’auteur apporte ici son éclairage sur l’un des points-clés de la profession de franchiseur.

      Paradoxe ! Le Savoir-faire en franchise est la fois, à transmettre… et à ne pas transmettre ! L’objectif de tout franchiseur est la création d’un réseau solide et pérenne. Solide, parce que chaque membre individuel exploite le savoir faire « inventé » par le franchiseur avec succès. Pérenne parce que à la fin du contrat, franchisé et franchiseur ont envie de renouveler le contrat.

      Paradoxalement, « solide » et « pérenne » peuvent être contradictoires. Le franchisé réussit parce que le savoir-faire a été bien transmis et qu’il est maîtrisé dans sa mise en œuvre. A l’expiration du contrat, le franchisé peut se dire qu’il maîtrise ce savoir-faire tellement bien, qu’il n’a plus besoin du franchiseur et qu’il pourrait facilement augmenter son propre profit en ne payant plus de royalty. C’est en particulier vrai dans la plupart des franchises de service.

      Nous touchons là une des subtilités stratégiques dans le management des réseaux : comment faire réussir le franchisé tout en ayant construisant sa franchise de manière à ce que le franchisé ait toujours besoin du franchiseur !

      La solution : clairement et consciemment dissocier le savoir-faire transmis et le savoir-faire mis à disposition.

      Le savoir-faire transmis est celui que le franchisé ne connaissait pas avant d’entrer dans le réseau mais qu’il maîtrise parfaitement après la formation et peut facilement utiliser dans un autre réseau. C’est tout le savoir-faire lié à la recherche d’emplacement, à la connaissance des produits, à l’utilisation d’une carte de client, à la maîtrise de la stratégie de promotion, à la construction d’un plan média et d’un plan marketing, aux techniques de vente, aux techniques de management, à l’essentiel des techniques de gestion.

      Le savoir-faire mis à disposition est celui dont le franchisé va bénéficier tout au long de la relation contractuelle mais qu’il n’aura plus à disposition après la fin du contrat. C’est le savoir-faire lié au renforcement de la marque, à l’architecture et au merchandising, à la dynamique de l’évolution de la gamme de produits, au traitement des fichiers clients, à la production de supports marketing, à la croissance du réseau, aux négociations fournisseurs, à toute la dynamique de l’animation, notamment l’accès aux indicateurs de performance comparés, aux systèmes d’information.

      Le savoir-faire transmis est plus directement lié à l’exploitation du concept, le savoir-faire mis à disposition est plus directement lié à l’organisation du franchiseur.

      La maîtrise du premier savoir-faire peut donner l’impression au franchisé qu’il peut se passer du franchiseur, si ce dernier n’a pas su faire ressentir tout le poids que représente le deuxième savoir-faire dans la réussite du franchisé.

      Tout l’art de la construction d’une franchise réside donc dans le renforcement conscient et permanent des deux catégories de savoir-faire. Les deux vont de pair et se renforcent mutuellement. Le savoir-faire transmis maximise les résultats du franchisé, le savoir-faire mis à disposition, rend le franchiseur « le plus indispensable » possible et alimente le franchisé en permanence en nouveaux leviers de succès.

      Subsidiairement, la qualité du savoir-faire transmis renforce la clause de non-affiliation post-contractuelle qui devient alors totalement justifiée : ce savoir-faire, s’il quittait le réseau, profiterait directement à l’enseigne concurrente.
      Subsidiairement encore, la force du savoir-faire mis à disposition réduit l’envie de quitter l’enseigne et contribue à créer un réseau dans lequel « il fait bon vivre » ….. stade ultime de la réussite du franchiseur.