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      La protection du franchisé allemand

      Tribune publiée le 23 août 2011 par Sophie BIENENSTOCK 
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      La loi allemande ne prévoit pas d’obligation légale d’information précontractuelle. Le franchisé allemand est toutefois protégé de différentes manières avant et aussi après la signature de son contrat.

      Le droit allemand ne contient aucune disposition spécifique à la franchise, si bien que le droit commun prend ici le relais. Concernant la période précontractuelle, deux mécanismes originaux sont utilisés.

      La notion de culpa in contrahendo

      La loi allemande ne prévoit pas d’obligation légale d’information précontractuelle à la charge du franchiseur. On ne saurait cependant en déduire que cette obligation est inexistante : le devoir d’information précontractuel découle de la théorie jurisprudentielle de la culpa in contrahendo, inspirée de l’œuvre de Ihering et consacrée explicitement dans un arrêt du Reichsgericht en 1904. Près d’un siècle plus tard, cette notion a finalement été intégrée dans le BGB (le code civil allemand). Elle fait peser sur les négociateurs une obligation de bonne foi et de loyauté pendant les pourparlers.

      L’originalité de cette théorie réside dans l’extension – du régime applicable à l’exécution du contrat – à la période précontractuelle. L’article 311 alinéa 2 du BGB est à cet égard très explicite : « un rapport d’obligations (…) naît aussi de l’engagement de pourparlers ».

      Cette extension du régime contractuel aux pourparlers s’oppose en tous points avec le droit français, qui reste très attaché à une stricte distinction des responsabilités, contractuelle d’un côté, délictuelle de l’autre.

      Le procédé présente des avantages certains : la responsabilité contractuelle est plus facile à mettre en œuvre et connaît peu d’exceptions, ce qui garantit une protection accrue du franchisé. Quant au contenu et au régime de l’obligation d’information, ils diffèrent peu de notre loi Doubin. Comme en France, toute violation de l’obligation est sanctionnée par une annulation rétroactive du contrat.

      L’existence d’un délai de rétractation.

      Le second mécanisme garantissant outre-Rhin la protection du franchisé pendant la période précontractuelle est directement inspiré du droit de la consommation.

      A l’image du consommateur, le franchisé bénéficie d’un délai de rétractation de deux semaines. Après quelques errements jurisprudentiels, on admet depuis un arrêt de février 2008 que le droit de la consommation n’est en principe pas applicable aux commerçants indépendants. Mais le BGB prévoit une exception pour le droit de rétractation (article 505 et 507 du BGB).

      Le franchisé bénéfice donc d’un délai de deux semaines à compter de la réception par écrit d’une information complète relative à ce droit (délai, modalités d’exercice, conséquences…).

      Les effets d’une rétractation sont très lourds, puisque l’ensemble des prestations doit être restitué par les parties. La situation est particulièrement délicate si le franchisé exerce son droit alors que le contrat connaît déjà un début d’exécution : le franchiseur est alors tenu de reverser l’intégralité des redevances perçues, tandis que le franchisé doit indemniser le franchiseur pour le savoir-faire qui lui a été transmis. On imagine aisément les complications liées à l’évaluation du savoir-faire… sachant que si le franchiseur ne parvient pas à justifier l’évaluation qu’il fournit, l’indemnisation n’aura pas lieu !

      L’idée d’appliquer un mécanisme issu du droit de la consommation aux contrats de franchise est pour le moins intéressante : dans les deux cas il s’agit d’un contrat d’adhésion, qui ne laisse aucune marge de manœuvre à l’une des parties. Or c’est précisément pour pallier cette absence de liberté contractuelle au stade des négociations qu’une protection accrue du consentement du franchisé est indispensable.