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      La nullité du contrat de franchise : difficile à obtenir de la justice

      Tribune publiée le 25 août 2016 par Jean-Pierre PAMIER
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      Obtenir la nullité de son contrat de franchise pour manque de rentabilité du concept devient de plus en plus rare. Il est au contraire fréquent de voir les tribunaux débouter les franchisés qui la réclament, comme en attestent plusieurs décisions récentes.

      Les futurs franchisés doivent le savoir : les tribunaux semblent de plus en plus réticents à prononcer la nullité des contrats de franchise réclamée par des franchisés en situation d’échec.
      Quand elle est prononcée, cette nullité s’accompagne pour le franchisé au moins du remboursement des redevances et droits d’entrée qu’il a versés et peut, en outre, donner droit parfois à des dommages et intérêts pour le préjudice subi.

      Même quand le réseau va mal…

      Mais c’est de plus en plus rare.
      Même quand le plaignant invoque, par exemple, les mauvais résultats d’une filiale du franchiseur exploitant des points de vente au concept. Même s’il affirme que, s’il avait connus ces pertes, qui lui étaient dissimulées, il n’aurait pas contracté.
      Même quand le franchiseur, manifestement défaillant, a perdu les deux-tiers de son réseau en quelques années et a été placé en redressement judiciaire.
      Même quand le réseau est connu pour son très important turn over et les problèmes de rentabilité récurrents de nombre de ses franchisés.

      Des franchisés fréquemment déboutés

      Comme en attestent plusieurs décisions récentes de cours d’appel, les franchisés plaignants se retrouvent fréquemment déboutés de leurs demandes, voire condamnés.

      Il suffit que l’avocat du franchiseur produise quelques exemples de franchisés qui ont réussi pour que les juges considèrent que le concept est rentable. Même si des dizaines d’autres du même réseau ont échoué.
      Il suffit que le franchisé se soit engagé alors que, manifestement, il ne pouvait pas ignorer la mauvaise situation du réseau pour qu’il soit considéré comme seul responsable de son échec. Peu importe qu’il n’ait eu accès qu’à la partie la plus récente de l’historique.

      Démontrer le caractère déterminant de certaines défaillances de l’information précontractuelle délivrée n’est pas évident

      Démontrer que l’on a été trompé n’est pas évident. Encore faut-il prouver, par exemple, que l’information précontractuelle a été défaillante (par rapport à ce que prévoit la loi). Et que cette défaillance (omission ou déformation de la réalité) a été déterminante dans les choix du franchisé.
      Dans un arrêt récent, la cour d’appel de Paris (Pôle 5, chambre 4)  le réaffirme : « le manquement à l’obligation d’information précontractuelle prévue à l’article L 330-3 du code de commerce n’entraîne la nullité du contrat de franchise que s’il a eu pour effet de vicier le consentement du franchisé ».

      Dans le même ordre d’idées : « le dol par rétention d’information ne peut être constitué que si un manquement à une obligation précontractuelle d’information présente un caractère intentionnel, et a été déterminant dans le consentement de la partie qui soutient avoir été victime de dol ».

      Difficile de démontrer aux juges la non-rentabilité d’un concept de franchise

      De même, démontrer que l’on a signé son contrat par erreur, que l’on a, par exemple, été trompé sur les espérances de gains par un prévisionnel trop optimiste n’est pas évident. Encore faut-il prouver qu’il émanait bien du franchiseur et qu’il était de nature à induire en erreur. Il y a eu – sur ce sujet des prévisionnels –  des décisions de justice étonnantes.

      Quant à la rentabilité, la cour d’appel de Paris rappelle que « la réalisation des résultats escomptés est dépendante de facteurs inhérents à l’exploitation et à la gestion de la société par son dirigeant ». Attention, donc, aux « erreurs de gestion » que les juges ne manqueront pas d’opposer aux franchisés.
      Les magistrats de Paris (parmi les plus spécialisés en litiges concernant la franchise) vont plus loin encore et introduisent l’idée qu’établir la non-rentabilité d’un concept relève quasiment de l’impossible dans la mesure où « sa mise en oeuvre dépend des modes d’exploitation de chaque société (franchisée) ».

      La cause de l’échec est souvent rejetée sur le franchisé lui-même

       

      Tout dépend enfin de la personne du franchisé. De son expérience professionnelle, de sa connaissance ou non du métier de chef d’entreprise, des règles de la gestion, du management, du marketing, mais aussi de sa connaissance  de la franchise en général, de l’enseigne concernée, du secteur, de la région. Il est rare que le franchisé soit vraiment néophyte en tout.
      Et même là, tout dépend encore…
      Car, il ne faut jamais l’oublier, « le franchisé est un commerçant indépendant sur lequel repose le devoir de se renseigner et de procéder lui-même aux vérifications, notamment en interrogeant les autres points de vente ».

      Mieux vaut ne pas se tromper de partenaire …

      Beaucoup de demandes d’annulation du contrat échouent aujourd’hui, après, souvent, des procédures longues et coûteuses (10 ans, parfois !). Mieux vaut le savoir et mener son enquête avant de s’engager.