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      Une clause de non-concurrence doit-elle s’appliquer au sein d’un même réseau ?

      Tribune publiée le 29 août 2012 par Monique BEN SOUSSEN
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      Quand le directeur d’un supermarché exploité en coopérative est engagé dans un autre magasin à la même enseigne voisin du premier, la clause de non-concurrence figurant dans son contrat de travail doit-elle s’appliquer ? La Cour de cassation a tranché.

      Voici le directeur d’un supermarché exploité sous l’enseigne E. Leclerc. Son contrat de travail stipule une clause de non-concurrence qui lui interdit « de travailler dans toute entreprise, d’une surface de vente comprise entre 1 000 m² et 10 000 m², ayant pour objet la vente au public de produits ou marchandises concurrençant directement ou indirectement les nôtres, et ce dans un rayon de 100 kilomètres à vol d’oiseau autour de notre magasin ». Ce directeur démissionne néanmoins : il est engagé en la même qualité dans un autre magasin E. Leclerc situé à une trentaine de kilomètres du premier. Question : le nouvel employeur est-il réellement un concurrent de l’ancien ? Son appartenance au même réseau de distribution ne privait-elle pas la clause litigieuse de son efficacité ?

      Deux interprétations possibles

      Deux interprétations étaient possibles. La première consistait à souligner l’indépendance des commerçants affiliés à un même réseau. Sous cet angle, la clause de non-concurrence devait recevoir application de manière extrêmement classique sans avoir égard à l’appartenance du nouvel employeur.

      La seconde, elle, privilégiait une approche davantage « corporatiste » : à partir du moment où les entreprises d’un même réseau se plient à une discipline collective, elles participent presque d’une même entité, le réseau, ce qui justifie l’adaptation du droit de la non-concurrence : la clause ne pouvait produire aucun effet dans la mesure où le nouveau contrat de travail litigieux n’accusait pas vraiment une migration du salarié.

      Une solution équilibrée

      S’agissant du réseau E. Leclerc, cette seconde analyse reposait sur l’ensemble des liens que ses membres sont amenés à tisser entre eux : adhésion  à l’association des centres distributeurs E. Leclerc (ACDLEC) et participation à un millefeuille de structures coopératives, au premier rang desquelles la centrale nationale de référencement : le GALEC.

      A première vue, le débat semblait opposer une approche juridique de la notion de réseau à une approche plus économique. Optant pour la première, la chambre sociale de la Cour de cassation n’en ménage pas moins une certaine place pour la seconde : une solution équilibrée, donc, que celle découlant de l’arrêt du 16 mai 2012 (Cass. soc., 16 mai 2012, n° 11-10.712, FS-P+B).

      Sans doute la Cour de cassation pose-t-elle en principe que l’intégration dans le même réseau ne suffit pas, en elle-même, à exclure l’existence d’un état de concurrence entre les entreprises qui en font partie. Mais les juges du fond sont invités à vérifier au cas par cas s’il existe une situation de concurrence entre les entreprises concernées afin de déterminer si la clause de non-concurrence stipulée au contrat de travail est valable ou pas.

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