Commentant une décision de la cour d’appel de Paris dans un litige opposant un agent immobilier franchisé à son franchiseur, l’auteur, avocat, rappelle les conditions de validité d’une clause de non-réaffiliation.
Par Maître Fanny Roy, Avocat associé, Roy & Associés
Un litige opposant un agent immobilier franchisé à son franchiseur a récemment été tranché par la cour d’appel de Paris, confirmant l’importance du formalisme contractuel et la portée d’une clause de non-réaffiliation dans un contrat de franchise.
Le différend ne portait pas sur l’exécution du contrat à proprement parler, mais sur une question apparemment secondaire : la date de signature du contrat de franchise. Le franchisé soutenait que cette date ne correspondait pas au début réel de la relation commerciale avec le franchiseur, affirmant que les liens contractuels s’étaient noués plus tôt de manière informelle. De son côté, le franchiseur estimait que la date de signature était la seule date valable à prendre en compte, même si certaines prestations — comme le versement du droit d’entrée — avaient eu lieu en amont.
Dans son arrêt, la cour d’appel se montre inflexible : la date de signature formelle du contrat constitue le point de départ des obligations contractuelles, peu importe que des paiements ou engagements aient précédé cet acte. Selon la cour, la rigueur du droit impose de se référer à ce moment précis, seule date juridiquement opposable aux parties.
La décision aborde également la procédure de renouvellement du contrat, qui prévoyait que le franchiseur devait proposer un nouveau contrat sept mois avant l’échéance du contrat en cours, puis en rappeler les termes quatre mois avant la fin. Or, ce calendrier n’a pas été respecté. Le franchisé en a-t-il pâti ? Non, répond la cour : le non-respect de ces délais n’est pas sanctionné, dès lors que le franchisé ne démontre pas avoir manifesté une volonté de poursuivre la relation contractuelle ou réclamé un nouveau contrat.
Mais le point le plus sensible de l’affaire concernait une clause de non-affiliation, typique des contrats de franchise. Celle-ci interdisait au franchisé, après la fin du contrat, de s’affilier à un réseau concurrent pendant un an, mais seulement dans les locaux et sur le terrain où il exerçait auparavant.
Se référant à l’article L.341-2 du Code de commerce, la cour rappelle les conditions strictes de validité d’une telle clause : elle doit être limitée dans l’espace, dans le temps (un an), porter sur les mêmes biens ou services, et surtout être indispensable à la protection du savoir-faire transmis.
Le franchisé plaidait que d’autres clauses – de confidentialité, de loyauté, et de restitution du matériel – assuraient déjà cette protection. Il ajoutait qu’il avait rejoint une autre enseigne appartenant au même groupe économique, suggérant l’absence de risque réel.
La cour d’appel balaie ces arguments. Pour elle, le savoir-faire d’un réseau de franchise ne se limite pas à des outils numériques ou à une charte graphique : il inclut l’expérience opérationnelle, les méthodes transmises dans des formations, les processus internes et les relations au sein du réseau. Elle estime donc que les clauses générales de confidentialité ne suffisent pas à protéger un savoir-faire aussi large, et que la clause de non-réaffiliation est ici justifiée et proportionnée.
Quant à l’appartenance du nouveau franchiseur au même groupe que l’ancien, cela n’a aucune incidence juridique : les entités demeurent distinctes, et leurs contrats doivent être considérés séparément.
Cette décision s’inscrit dans la lignée d’une jurisprudence exigeante à l’égard des contrats de franchise. Elle réaffirme le rôle central du formalisme et de la date de signature comme point de référence absolu, tout en validant les clauses de non-réaffiliation bien encadrées, lorsque celles-ci répondent aux critères légaux.
Un signal fort envoyé aux acteurs du secteur immobilier — et à tous les réseaux de franchise — quant à la nécessité de soigner tant la rédaction que l’exécution de leurs conventions.