Fermer
Secteurs / Activités

      Alimentaire : les nouveaux défis des enseignes du bio

      Actu secteurs
      24 septembre 2012

      Portées par un marché dynamique, les enseignes spécialisées en produits bio continuent à élargir leurs parcs de magasins. Mais la concurrence est de plus en plus rude, en particulier du côté de la grande distribution.

      Un marché qui frôle les 4 milliards

      Si le bio demeure une niche du marché de l’alimentaire (il ne représente que 2,4 % de l’ensemble des dépenses du secteur), le nombre d’acteurs qui s’intéressent à ce créneau – comme celui des magasins proposant une telle offre – est toujours plus important. Cette évolution est d’autant plus sensible à l’heure où la consommation générale donne des signes d’essoufflement. Car le bio, lui, continue d’afficher une forte croissance et de générer des marges intéressantes.

      Les ventes de produits biologiques sont toujours à la hausse. Selon l’Agence Bio, ce marché a enregistré, en 2011, un chiffre d’affaires de plus de 3,9 milliards d’euros (+ 11 %). Des chiffres à rapprocher du marché des produits de grande consommation (produits alimentaires et produits d’entretien)… qui n’a progressé que de 3 %.

      Bien sûr, les parts de marché sont plus ou moins importantes selon les secteurs : les grandes surfaces alimentaires représentant 49 % des ventes à 1,8 Md€ et les magasins spécialisés 25 %.

      L’offensive de la grande distribution

      Et tout le monde veut sa part du gâteau. C’est le cas en premier lieu des gros groupes de la grande distribution. Depuis quelques années, les enseignes alimentaires ont développé des rayons consacrés aux produits bio. Puis elles ont créé leurs propres marques. Celle de Carrefour, appelée Agir, comporte aujourd’hui pas moins de 350 produits.

      Depuis peu, ces géants sont passés à la vitesse supérieure. A la mi-2008, le groupe Casino-Monoprix a repris la chaîne succursaliste Naturalia, avec l’objectif de la faire grandir. Au moment de ce rachat, le réseau alignait 38 points de vente. Il en regroupe aujourd’hui 66 en France, dont 56 en région parisienne.

      Auchan a fait un autre choix : il a inauguré, en mai 2012, un magasin pilote de 1 000 m², baptisé Cœur de nature, à Brétigny-sur-Orge (Essonne). Au même moment, de nombreuses indiscrétions faisaient état d’un projet similaire chez Carrefour, consistant à ouvrir un Carrefour Bio dans Paris. E. Leclerc, lui, a prévu de consacrer 20 % des 2 000 m² de son futur magasin de Houilles (Yvelines) – dont les travaux sont pour l’instant bloqués par un recours en CNAC – aux produits naturels.

      Bien sûr, cette offensive sur le bio demeure encore au niveau des tests et le déploiement en grand nombre d’unités de 1 000 m2 n’a pas encore fait la preuve de sa viabilité économique. Pourtant Naturéo, lancé en 2008 par un ancien d’Intermarché a déjà implanté 12 grandes surfaces de ce type, et en annonce d’autres. Même si sa croissance est moins rapide que prévu, il s’agit bien d’une chaîne (intégrée) en cours de constitution.

      Les enseignes grossissent

      De leur côté, pratiquement toutes les enseignes relevant du commerce organisé en réseau ont poursuivi leur progression. C’est le cas du leader, Biocoop, qui est apparu en 1988. Tout en se dotant progressivement d’outils commerciaux et marketing, l’enseigne a conservé sa philosophie “militante” pure et dure : refus des OGM, du transport par avion ou de la vente des fruits et légumes en dehors de leur saison de production. L’enseigne regroupe 340 points de vente mesurant de 30 à 700 m2. Avec 25 à 40 ouvertures (ou ralliements) par an, Biocoop espère aligner 500 unités à l’horizon 2015.

      La Vie Claire, pionnier du secteur avec une création qui remonte à 1946 après une histoire mouvementée, a pris, il y a huit ans, un nouveau départ, en s’appuyant sur sa notoriété demeurée intacte. Présente historiquement en centre-ville, elle s’est aussi orientée vers les zones commerciales de périphérie, où les chiffres d’affaires réalisés sont nettement plus importants. Elle fédère aujourd’hui 210 boutiques, dont plus de 160 en franchise, et ouvre une quinzaine d’unités nouvelles chaque année.

      Créée en 1979, L’Eau Vive, implantée à l’origine en région Rhône-Alpes, a, quant à elle, accéléré le rythme depuis 2009 en s’ouvrant à la France entière, en particulier grâce à la franchise, sur des surfaces de 450 à 500 m2. L’enseigne regroupait, à l’été 2012, 34 unités, mais faisait état de nouveaux projets pour la rentrée.

      Enfin la coopérative Biomonde, issue d’un petit groupement de commerçants créé en 1991, a vu le jour en mars 2008. Depuis, elle a poursuivi sa progression et annonce désormais plus de 180 adhérents.

      Seul petit bémol a ce tableau très positif : Satoriz ! Implantée essentiellement dans l’Est et en Rhône-Alpes, l’enseigne avait fait au milieu des années 2000 une tentative de développement en franchise, mais a aujourd’hui renoncé, faute de structure ad hoc.

      Une offre toujours plus large

      Tous les intervenants semblent donc tirer profit de la croissance de ce marché. Mais cela durera-t-il toujours? La grande distribution ne risque-t-elle pas, à un moment ou à un autre, d’assécher les possibilités d’expansion des enseignes (et de tirer les marges vers le bas) comme elle l’a fait dans d’autres secteurs ?

      Les responsables des réseaux ne semblent, pour l’instant, pas effrayés par cette perspective. À commencer par Gilles Piquet-Pellorce, directeur général de Biocoop, qui se félicite des projets en cours : “Nous, nous n’avons pas les moyens de faire beaucoup de publicité. Or, les grandes surfaces communiquent beaucoup sur le bio, plus que nous. Dans un certain sens, cela nous sert, analyse-t-il. D’autant que beaucoup de consommateurs commencent à acheter des produits en grande surface lors de la naissance de leur premier enfant. Puis ils nous découvrent et viennent dans nos magasins. À nous de les fidéliser en leur prouvant que nous sommes différents”.

      Les réseaux spécialisés entendent cultiver cette différence en proposant une offre toujours plus large, et en tout cas bien plus importante que celle présente dans les hypers ou supermarchés. Ils font aussi évoluer leurs espaces de vente vers des surfaces plus grandes (sur 200, 300 voire 400 ou 500 m2), en y soignant l’accueil et l’information. Récemment, La Vie Claire a, par exemple, ouvert des magasins équipés d’un rayon boucherie et d’un fournil.

      À moyen terme, il est probable que le secteur du bio va encore susciter bien des vocations et que tout le monde pourra y trouver son compte. Mais il est certain aussi que la concurrence qui règne dans ce secteur va continuer à se renforcer. Si le bio représente donc toujours de belles opportunités pour tous ceux qui s’intéressent au commerce organisé, il sera de moins en moins possible de miser seulement sur la croissance naturelle du marché. Cela exigera de préparer son projet avec toujours plus de professionnalisme. Une solide étude de marché et une bonne connaissance des projets d’urbanisme qui pourraient modifier la zone de chalandise seront plus que jamais nécessaires avant toute perspective d’implantation.

      Enseignes du même secteur