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      Membres d'un même réseau, mais concurrents ! - Brève du 3 septembre 2012

      Brève
      3 septembre 2012

      Bien que membres d’un même réseau, les commerçants sous enseigne (affiliés, franchisés) peuvent être concurrents entre eux. Ainsi en a jugé la Cour de cassation le 16 mai 2012 dans un conflit intervenu au sein du groupement Leclerc.

      Un salarié peut-il librement quitter un affilié (ou un franchisé) pour un autre membre du même réseau ? Ou bien est-il tenu de respecter sa clause de non-concurrence ?  La question a été posée à la plus haute juridiction française lors d'un litige survenu au sein du groupement E. Leclerc.
      Un directeur de magasin E. Leclerc était tenu par une clause de non-concurrence. Clause qui lui interdisait, pour une durée de deux ans, de rejoindre un poste similaire dans un rayon de 100 km autour de son magasin. Or, l'autre centre E. Leclerc qu'il rejoint – aussitôt après sa démission du premier – est situé à 30 km. Son ex-employeur refusant de lui verser la contrepartie financière de sa clause, le salarié saisit les prud'hommes.
      Appelée à se prononcer, la cour d'appel de Douai considère dans son arrêt du 19 novembre 2010 que le « mouvement Leclerc » n'est certes pas un groupe au sens capitalistique du terme, mais représente quand même un ensemble structuré menant une politique commerciale commune. Elle en déduit que les magasins à l’enseigne E. Leclerc ne sont pas des entités concurrentes entre elles et que le salarié n’a donc pas violé son obligation de non-concurrence.
      C'est cette décision que casse la Haute Cour dans son arrêt du 16 mai 2012. Pour les magistrats – qui soulignent l'importance de leur décision en la publiant au bulletin -, « l’intégration dans un même réseau de distribution ne suffit pas en elle-même à exclure l’existence d’un état de concurrence entre les entreprises qui en font partie ».
      L'affaire est donc renvoyée devant la cour d'appel d'Amiens qui devra « vérifier concrètement l’existence d’une situation de concurrence entre les deux magasins concernés ». Si oui, le salarié aura rompu sa clause…
      Selon la « Lettre de la Distribution » de juin 2012, la limitation dans l'espace de la clause litigieuse « paraît excessive (100 km) », alors que la norme dans la grande distribution serait « plutôt de 50 km ». Et surtout, les experts s'interrogent : existe-t-il un véritable « intérêt légitime à protéger pour l'employeur dès lors que ce n'est pas lui qui fixe la stratégie commerciale de son magasin, mais l'association dont il fait partie et dont fait partie aussi le nouvel employeur du salarié ? »
      Pour d'autres spécialistes, la décision de la Cour de cassation paraît en revanche plutôt « équilibrée« . Les réseaux  de commerce associé et de franchise s'intéresseront certainement à la réponse de la cour d'Amiens.

      Lire sur le sujet l'analyse de Maître Monique Ben Soussen