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      Bien comprendre son contrat de franchise

      Dernière mise à jour le 3 juin 2021

      Le contrat de franchise va fonder la relation entre la tête de réseau et le franchisé durant des années. Dès lors, il est impératif que ce dernier en assimile bien la portée de chaque clause.

      Il n’existe pas de réglementation spécifique concernant le contrat de franchise. Aucune clause n’est obligatoire, contrairement, par exemple, à ce qui se passe pour un contrat de travail. “Le principe de liberté prévaut. Toutefois, du fait qu’il s’agisse d’un contrat de franchise, on doit y trouver la mise à disposition d’une marque, la transmission d’un savoir-faire ainsi qu’une assistance durant le contrat”, précise Olivier Deschamps, avocat au sein du cabinet D, M&D Lawrope.

      Le document doit être très concret et précis car il va décrire la relation sur de nombreuses années entre le franchiseur et le franchisé. Ce dernier se doit de parfaitement comprendre et assimiler l’ensemble des clauses. “Il est fondamental qu’un candidat comprenne parfaitement, avant de signer, la portée de ses propres engagements”, insiste l’avocat. “Comme il n’existe pas d’obligations légales quant aux engagements du franchiseur, il faut que chaque élément constitutif de la relation avec son franchisé soit mentionné dans le contrat”, confirme Laurence Vernay, avocat au sein du cabinet Saje.
      En premier lieu, le futur franchisé doit porter son attention sur la nature de l’accord. “Il faut se montrer extrêmement vigilant sur son intitulé même. Lorsque le candidat veut s’engager dans un réseau de franchise, il ne s’agit pas pour lui de signer un contrat de partenariat commercial ou de licence de marque”, insiste Laurence Vernay.

      Les éléments financiers sont, bien évidemment, à analyser avec soin. Le franchiseur sérieux va déterminer le niveau du droit d’entrée et des redevances en fonction des services qu’il apporte à ses franchisés.

      Leurs montants doivent être très clairement indiqués dans la convention. Le franchisé doit également se montrer très vigilant quant aux modalités de règlement. “De nombreuses questions sont à se poser comme, par exemple, le fait de savoir si le franchisé va payer le droit d’entrée au moment de la signature ou à l’ouverture de la boutique. Par ailleurs, les méthodes de calcul des redevances doivent être décrites très précisément”, prévient Laurence Vernay.

      Sur la question de la formation, le contrat doit notamment indiquer sa durée. Le franchiseur peut, par ailleurs, mentionner les thématiques abordées. Comme le note Olivier Deschamps, les précisions seront appréciables car elles attesteront du sérieux de l’enseigne et rassureront ainsi le candidat.

      “Il faut se méfier des contrats qui ne seraient pas suffisamment précis sur les engagements du franchiseur en matière d’assistance”, estime en outre Laurence Vernay. Que propose-t-il en termes d’actions marketing, de communication et de publicité ? A quelle fréquence prévoit-il la visite d’un animateur ? Tous ces aspects doivent être quantifiés et le candidat doit savoir s’il s’agit d’engagements fermes et précis de la tête de réseau.

      Les clauses d’exclusivité et de non-concurrence sont de celles qui génèrent le plus de contentieux. Le franchisé et son conseil doivent les examiner avec soin. “Les clauses de non-concurrence sont de plus en plus restrictives et ne sont acceptées par les tribunaux que si, vraiment, elles sont destinées à assurer la protection du savoir-faire du franchiseur”, précise Olivier Deschamps.

      La jurisprudence est désormais assez bien établie : la clause de non-concurrence s’applique au lieu d’exercice de l’activité de la franchise, à savoir la ville en question, et non pas à la France entière, ni même au département. Cette disposition doit en outre concerner l’activité précise et s’appliquer sur une durée d’un an maximum. La clause de non-affiliation, quant à elle, signifie que, durant un an, le franchisé qui sort d’un réseau ne peut pas s’affilier à un réseau concurrent.

      Les clauses d’exclusivité et de territoire doivent être très précisément indiquées. “Est-ce une exclusivité de franchise, d’enseigne ou de produit ? Et sur quelle zone géographique ?”, demande Laurence Vernay. L’exclusivité de franchise signifie que le franchisé sera le seul à représenter l’enseigne sur un territoire donné. L’exclusivité de produit va plus loin : cette disposition implique qu’il sera le seul à pouvoir diffuser le produit sur le territoire, sauf pour les ventes sur Internet qui sont souvent écartées de la clause.

      “Le candidat doit vraiment porter une attention particulière à ces clauses. S’il possède une exclusivité territoriale mais pas une exclusivité de produit, il sera certes le seul sur le territoire à posséder l’enseigne X mais le produit pourra être distribué par un autre canal, comme une grande surface. Si l’exclusivité de produit n’est pas mentionnée dans le contrat, cela signifie que le franchisé n’en bénéficie pas”, précise Olivier Deschamps.

      Quid de la durée de l’engagement ? Idéalement, c’est celle qui permet au franchisé d’asseoir son activité et d’amortir son investissement. Dans la grande majorité des cas, le contrat de franchise s’étale sur 5 ans mais certaines banques peuvent demander qu’il courre le temps que le prêt soit totalement remboursé, donc sur 7 années.

      Quant aux clauses concernant le renouvellement de son contrat, le candidat à la franchise devra notamment bien regarder si un nouveau droit d’entrée est à payer et s’il s’agit d’une tacite reconduction. “J’aime bien la disposition qui stipule que le franchiseur s’engage à renouveler le contrat de franchise si le franchisé est à jour du paiement de ses redevances et que le premier contrat s’est correctement déroulé”, poursuit Laurence Vernay.

      Toutes les clauses concernant la sortie du réseau doivent, elles aussi, être analysées avec une grande attention. “Les cessions sont encadrées, si le franchiseur a choisi son franchisé, il semble légitime qu’il puisse choisir son successeur”, prévient Laurence Vernay. Il existe donc quasiment toujours une clause d’agrément ainsi qu’un droit de préemption du franchiseur, dans les contrats de franchise.

      A travers l’ensemble de ces différentes clauses, le contrat doit bien définir le rôle des deux parties, qui sont aussi deux chefs d’entreprise. Il est vrai que la frontière entre l’assistance et l’ingérence peut être fine. A titre d’exemple et comme le constate Olivier Deschamps, il est encore mentionné dans certains contrats que « les prix de revente seront déterminés par le franchiseur”. Or, une telle modalité entraîne la nullité du contrat. De même, rappelle l’avocat, le franchiseur ne peut pas y stipuler qu’il s’octroie le droit de valider le recrutement du personnel du franchisé.

      “Il est normal que le franchiseur récupère et traite de l’information émanant de ses franchisés pour établir ses tableaux de bord. En revanche, s’il traite ces informations pour ensuite dire au franchisé qu’il doit appliquer tel tarif ou se rémunérer à tel niveau, cela devient de l’ingérence”, confirme Laurence Vernay, qui conçoit toutefois que le franchisé puisse être « alerté » par sa tête de réseau si ses résultats sont mauvais.

      Enfin, un autre élément ne doit pas être oublié : les sites marchands sur Internet et les fichiers clients. Le franchisé peut-il ouvrir son propre site d’e-commerce ? Si le franchiseur en possède un, ne va-t-il pas, dans ce cas, empiéter sur la clientèle du franchisé ? Qui gère le fichier clients et à qui appartient-il ? Ces différents éléments doivent être précisés dans le contrat de franchise.

      Dans cette phase de l’élaboration du contrat et de sa signature, quel est le rôle de l’avocat et à quel moment doit-il intervenir ? “Dès que le franchisé reçoit le DIP (Document d’information précontractuel) et le projet de contrat, estime Laurence Vernay. Il expliquera ainsi au futur franchisé les règles du jeu qu’on lui propose, que le candidat validera si elles lui conviennent.”

      L’avocat n’est pas là uniquement pour expliquer le contrat sur un plan juridique, son rôle est aussi, et surtout, de faire des recommandations et de donner des conseils. Il vaut évidemment mieux se rapprocher d’un avocat spécialisé en franchise qui maîtrise non seulement le terrain juridique et la jurisprudence, mais aussi la pratique. Si les tarifs sont variables, la fourchette se situe entre 1 500 et 3 000 euros. Un investissement raisonnable, au vu du coût global d’une création d’entreprise en franchise, et qui peut éviter bien des déconvenues.

      Seules quelques clauses du contrat de franchise sont négociables, dans certaines conditions. L’avocat Olivier Deschamps (D, M&D Lawrope) les évoque pour nous :

      • Il est possible de négocier la clause d’intuitu personae. Si le candidat a 55 ans, il peut par exemple demander que l’intuitu personae porte sur lui-même, mais aussi sur son fils qui souhaite reprendre l’affaire à terme.
      • Un contrat de 5 ans peut être négocié pour une durée de 7 ans, pour coller avec la durée du remboursement de l’emprunt du franchisé à sa banque, par exemple.
      • Si l’ambition du franchisé est dès le départ d’ouvrir trois unités, il peut demander au franchiseur que lui soient réservées deux autres zones, en plus de la première.

      « La bonne négociation ne porte pas sur une réduction du droit d’entrée ou des redevances, mais sur des éléments qui prouvent que le franchisé a réfléchi à son projet à long terme. Par principe, le candidat a intérêt à se montrer méfiant vis-à-vis d’un franchiseur prêt à tout négocier. Ce dernier n’aura pas assez réfléchi en amont à son concept. Il sera prêt à tout accepter pour recruter de nouveaux franchisés et ainsi percevoir des droits d’entrée », conclut Olivier Deschamps.