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      Que peut espérer un franchisé lorsqu’il n’obtient pas le financement de son projet ? - Brève du 9 avril 2024

      Brève
      9 avril 2024

      Un franchisé à qui la banque a refusé son financement accuse son franchiseur d’en être responsable. Il obtient de la justice l’annulation de son contrat. Mais pas le remboursement du droit d’entrée ni le versement d’indemnités.

      cour d’appel de Colmar – Alsace – FranceLa cour d’appel de Paris vient d’annuler un contrat de franchise pour vice du consentement.

      Dans cette affaire, le contrat est signé à l’automne 2018 moyennant une somme de 23 400 € versée en paiement du droit d’entrée dans le réseau.

      Il est convenu entre les parties que l’établissement doit ouvrir dans les 12 mois qui suivent.

      Le franchisé part alors à la recherche d’un emplacement.

      Il signe en décembre un bail commercial pour un local dont il dispose à compter du 1er janvier 2019. Cette signature comporte toutefois plusieurs conditions suspensives de la part du franchisé, dont celle d’obtenir le financement de son projet.

      Or, en mai 2019, il apprend que la banque sur laquelle il comptait lui refuse le prêt de plus de 340 000 € qu’il lui avait demandé.

      Le franchisé, qui n’a pas obtenu le financement de son projet, estime que le franchiseur en est responsable

      C’est le début du litige.

      Le franchisé estime en effet avoir été induit en erreur par l’architecte du franchiseur qui lui a communiqué « un devis supérieur de 34,5 % au budget défini dans le manuel opératoire et repris dans le DIP (Document d’information précontractuelle), ce qui a provoqué le refus de la banque. »

      Selon le franchisé, la société franchisante ne l’a en outre pas assisté, ni dans la négociation du crédit ni lors de la conclusion du contrat de bail.

      Il affirme également que le franchiseur n’a pas respecté le délai légal de 20 jours entre la remise du DIP et la signature du contrat. Puisque le DIP lui a été remis le 14 septembre et qu’il a signé son contrat le lendemain 15 septembre 2018, date d’émission de son chèque de règlement du droit d’entrée.

      Le franchisé considère donc que son consentement a été vicié et réclame la nullité de son contrat.

      Le franchiseur lui, affirme au contraire que la signature du contrat de franchise a eu lieu en réalité le 15 octobre et qu’il n’y a donc pas de problème de délai légal.

      En septembre 2020, le tribunal de commerce tranche : il prononce la nullité du contrat de franchise mais n’accorde pas au franchisé les indemnités qu’il réclamait.

      Sans surprise, celui-ci fait appel de cette décision.

      Pour la cour d’appel, le franchisé a été induit en erreur sur des éléments déterminants de son consentement : le contrat est annulé

      Contract signatureSaisie, la cour d’appel de Paris confirme la nullité du contrat de franchise pour vice du consentement.

      Au vu des pièces produites au procès, les magistrats considèrent que « le délai de 20 jours prescrit par l’article L 330-3 (…) du code de commerce n’a pas été respecté. »

      Certes, cette infraction « n’emporte pas par elle-même la nullité du contrat ».

      « En revanche, la concomitance de la signature du contrat et de la remise du DIP (…) a induit (le franchisé) en erreur sur l’appréciation du coût (de l’opération) ».

      Aux yeux des juges, le franchisé a été trompé à la fois sur le montant des travaux à prévoir et sur le calcul des sommes à emprunter, mais aussi par rapport aux « offres des concurrents (qu’il a) finalement choisi de rejoindre ».

      Il n’a « pas pu mesurer la portée et l’utilité de (son) engagement et la faisabilité concrète (de son) projet (…) ». « Ces éléments étant déterminants du consentement des parties, le vice est caractérisé et fonde la nullité du contrat. »

      Les magistrats écartent la demande du franchisé concernant le remboursement de son droit d’entrée

      Toutefois, comme le tribunal de commerce, la cour d’appel de Paris n’accorde pas au franchisé le remboursement qu’il réclamait de son droit d’entrée.

      Les magistrats considèrent en effet que le franchiseur a, en contrepartie de la somme perçue, exécuté ses obligations.

      Il a ainsi préservé « jusqu’à la rupture des relations, la zone d’exclusivité » du franchisé. De même, il lui a transmis « son savoir-faire à travers la communication des manuels opératoires (..), l’organisation d’une formation initiale (…) et la fourniture d’une assistance dans la recherche d’un financement et d’un local à exploiter. »

      Le franchisé n’obtient pas non plus les indemnisations qu’il espérait

      La cour refuse également d’accorder au franchisé le remboursement de ses frais annexes (loyers, dépôt de garantie) versés selon lui en vain pour ce projet.

      D’abord parce que ces sommes n’ont pas été perçues par le franchiseur mais par le bailleur et que le franchiseur ne peut donc pas les restituer.

      Mais aussi parce que le franchisé a pu poursuivre l’exploitation de son local commercial en rejoignant dans la même activité une enseigne concurrente. « Les loyers versés ont conservés leur utilité malgré la nullité du contrat ».

      De même concernant les frais de courtage (engagés pour la recherche de son financement) : le franchisé ayant fini par obtenir un prêt et n’ayant subi aucune pénalité de la part du bailleur pour le retard dans la mise en œuvre de son projet.

      La cour écarte enfin la demande du franchisé sollicitant une indemnité complémentaire de 100 000 € pour le préjudice subi. Celui-ci étant, selon la cour, « indéterminé et indéterminable ».

      >Références de la décision :

      -Cour d’appel de Paris, Pôle 5 chambre 4, arrêt du 21 février 2024, n° 22/12529