Fermer
Secteurs / Activités

      Un franchisé sanctionné pour infidélité et déloyauté - Brève du 29 octobre 2021

      Brève
      29 octobre 2021

      La cour d’appel de Paris a résilié un contrat aux torts exclusifs du franchisé. Motif : il n’avait pas payé ses redevances après avoir appris que son contrat ne serait pas renouvelé. Il est sanctionné aussi pour ne pas avoir respecté son obligation de non-concurrence et s’être comporté de façon déloyale à l’égard de son franchiseur.

      Rupture contrat de franchiseC’est l’histoire d’une rupture qui se passe mal. Le 10 décembre 1998, un premier contrat d’une durée de 9 ans est signé. Il ne comprend pas de clause de tacite reconduction mais comme tout se passe bien, une nouvelle convention de même durée est conclue entre les deux parties en 2007. Avec une fin prévue le 10 décembre 2016.

      Toutefois, le 15 mai 2015 le franchiseur informe le franchisé de sa décision de ne pas renouveler ce second contrat lorsqu’il sera parvenu à son terme.

      Pour le franchisé, il y a eu « rupture brutale » des relations commerciales

      A partir de là, rien ne va plus. Le 15 décembre 2015, le franchiseur interroge par courriel son franchisé sur les raisons pour lesquelles les commandes de marchandises qu’il lui passe pour la fin de l’année sont en hausse anormalement importante, notamment depuis le mois d’octobre.

      A partir de janvier 2016, le franchisé cesse de payer ses redevances et début août, il assigne son franchiseur en justice. Il lui reproche « la résiliation fautive du contrat et le caractère brutal de la rupture de leurs relations commerciales ». Il l’accuse d’avoir cherché à ramener ses stocks de marchandises à zéro afin de l’empêcher de continuer son activité après la fin du contrat.

      Le 12 septembre 2018, le tribunal de commerce de Lyon lui donne raison et condamne le franchiseur à lui verser 180 000 € pour préavis insuffisant. Les juges y ajoutent le remboursement de 400 000 € correspondant aux nouveaux agencements que le franchisé a dû effectuer pour sortir du réseau et changer de concept. Même s’ils exigent aussi de lui qu’il s’acquitte du règlement de 44 000 € de redevances impayées.

      Pour la cour, le franchisé aurait dû payer ses redevances jusqu’au terme du contrat

      Saisie, la cour d’appel de Paris infirme, pour l’essentiel, ce jugement et prononce, par son arrêt du 8 septembre 2021, la résiliation du contrat aux torts exclusifs du franchisé.

      Pour les magistrats, « rien n’indique » que la société franchisée, qui n’a plus payé ses redevances à partir de janvier 2016, ait été « économiquement gênée » pour s’en acquitter. A leurs yeux, « la violation délibérée (de cette) obligation (de paiement) constitue un grave manquement contractuel ». Une faute « qui suffit, en l’absence de manquement du franchiseur », à justifier leur décision.

      La cour note en effet, à partir de l’analyse des factures, que les livraisons ont eu lieu « au moins jusqu’en décembre 2015 ». Par ailleurs, elle relève que « le franchisé ne justifie ni d’avoir manqué (de marchandises) pour aller jusqu’au terme du contrat, ni d’avoir mis en demeure le franchiseur de le livrer. » De même, il n’a pas répondu aux demandes d’explication de la tête de réseau sur ses commandes en forte hausse par rapport aux deux années précédentes, la dernière étant même qualifiée « d’exorbitante » par la cour.

      Il aurait dû aussi respecter son engagement contractuel de fidélité et son « devoir général de loyauté »

      cour d’appel de Colmar – Alsace – FranceMais ce n’est pas tout. Des constats d’huissier de mai et août 2016 établissent qu’une partie des marchandises commandées par le franchisé a été retrouvée dans les locaux d’un professionnel directement concurrent situé à des centaines de kilomètres de son établissement. Un professionnel exerçant sous une enseigne très voisine et sur la base d’un concept très proche de celui du franchiseur.

      Pour les magistrats, il y a là un « acte de concurrence (pendant le contrat) effectué en fraude des droits du franchiseur, ce qui est contraire à l’obligation de fidélité expressément définie par le contrat, ainsi qu’au devoir général de loyauté du franchisé ».

      Il est également établi que le franchisé se trouve être le dépositaire, au nom de sa société, de la marque installée au fronton de cet établissement concurrent (marque qu’il adoptera par la suite pour le sien propre).

      En outre, le franchisé a reconnu dans un SMS adressé au franchiseur être partie prenante de la gestion de ce point de vente, lequel est exploité par une société animée par son cousin. Il a ainsi participé au financement d’un équipement matériel important. Enfin, un jugement du tribunal de grande instance de Marseille a établi que la société de ce cousin avait été condamnée pour « parasitisme par captation » des signes distinctifs de la marque du franchiseur.

      Près de 60 000 € de redevances et 30 000 € de dommages et intérêts à payer au franchiseur

      Pour la cour d’appel de Paris, « il résulte de ce qui précède que la (société franchisée) doit être tenue pour complice des agissements parasitaires de la société (du cousin) au préjudice (du franchiseur) ».

      La cour condamne donc le franchisé à verser au franchiseur la somme de 20 000 € de dommages et intérêts au titre de son préjudice « commercial et moral », elle ajoute aux 44 000 € de redevances à payer pour les mois de janvier à juillet 2016 une somme d’un peu plus de 15 000 € pour celles qui auraient dû être versées d’août à décembre si le contrat s’était poursuivi jusqu’à son terme.

      La cour condamne encore le franchisé à verser à son ex-partenaire la somme de 10 000 € en compensation du préjudice subi personnellement par le franchiseur et certains de ses cadres moqués, dénigrés et insultés par écrit (lettre, courriel ou SMS) par le franchisé.

      Une addition évidemment décevante pour le franchisé par rapport à ce qu’il avait obtenu en première instance, mais décevante aussi pour le franchiseur qui réclamait au total plus d’un million d’euros en compensation des différents préjudices subis et, selon lui, de l’atteinte à son image de marque.

      Référence de la décision :

      Cour d’appel de Paris, Pôle 5 chambre 4, 8 septembre 2021, n° 18/21471

      A lire aussi sur le sujet :

      La lettre de la Distribution d’octobre 2021.