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      Quand un franchisé veut concurrencer son franchiseur… - Brève du 28 septembre 2020

      Brève
      28 septembre 2020

      Alors que son contrat lui interdit expressément d’exercer une activité similaire à celle de son franchiseur, un franchisé crée discrètement un réseau à sa propre enseigne. La cour d’appel de Lyon confirme et aggrave sa condamnation.

      cour d’appel de Colmar – Alsace – FranceLa cour d’appel de Lyon vient, le 17 septembre 2020, de condamner un franchisé pour concurrence déloyale.

      Dans cette affaire, le contrat de franchise est signé en 2012 pour une durée de 7 ans. Tout se passe bien pendant 4 ans au point qu’en 2016, le franchisé demande à son franchiseur la possibilité d’ouvrir un deuxième point de vente dans une autre ville de la même région. A cette fin, une nouvelle société est constituée par le franchisé début 2017.

      Le franchiseur – qui fédère alors plus d’une centaine de points de vente – donne son accord. Mais le franchisé affirme qu’il veut lui imposer ses prix, ce qui n’est pas légal. Tenté un instant de quitter la franchise, il « se ravise » et réoriente l’activité de sa première société vers un domaine voisin, autorisé par le contrat initial.

      Après quatre années de bons résultats, le franchisé crée d’autres sociétés…

      Le franchiseur s’aperçoit un an plus tard que son franchisé a créé, a priori depuis le début de 2017, « une activité directement concurrente » de la sienne, à partir de sa deuxième société. Et que, même si cette entité est au nom de sa compagne, le franchisé (au poste de directeur général) en est le « gérant de fait ». Dans un long courriel daté du 8 mars, il a d’ailleurs « adressé à ses collaborateurs une description détaillée du réseau de points de vente qu’il envisage de créer, promettant une prime à ceux qui trouveraient le nom » de la future enseigne…

      Lors des opérations de constat effectuées par des huissiers de justice, « un nombre très important d’e-mails a été saisi (…) et il est apparu que les collaborateurs du franchisé signaient leurs courriels sous la nouvelle marque ». Les mêmes ont, selon le franchiseur, « démarché activement » la clientèle « en dehors du territoire qui était réservé » par le contrat.

      Enfin, le franchisé a créé le 21 mars 2017 une troisième société, domiciliée dans un pays limitrophe, qui exerce également la même activité que celle du franchiseur. Or, son contrat de franchise signé en 2012 lui interdisait expressément toute activité concurrente pendant le contrat et toute création de réseau concurrent pendant deux ans après la fin du contrat.

      Condamné à 30 000 €, il fait appel, et conteste sa clause de non-concurrence

      Le 7 juin 2018 le franchisé est condamné par le président du tribunal de commerce de Paris, suivant ordonnance en référé, à « cesser immédiatement toute activité concurrente », sous peine d’une astreinte de 1 000 € par jour pendant 30 jours. Il continue toutefois, affirmant n’exercer que des activités autorisées par le contrat.

      Le 23 janvier 2020, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de sa ville condamne le franchisé à s’acquitter des 30 000 € d’astreinte dus pour la période fixée. Jugement dont il fait appel.

      Juridique-2Pour le franchisé, son adversaire « n’a pas apporté de preuves d’actes de concurrence déloyale » et « ne démontre pas » qu’il a « commis une faute dans l’exécution de ses obligations contractuelles (de franchisé) ». D’ailleurs, la clause de non-concurrence ne saurait selon lui être appliquée « dans la mesure où elle constitue par nature une restriction à l’activité commerciale du contractant » et l’interdiction (qui lui est) faite d’exercer toute activité potentiellement similaire à celle du franchiseur hors de son périmètre d’exclusivité « revêt un caractère manifestement déséquilibré au sens des articles 1171 du code civil et L.442-6 du code de commerce », ce qui devrait entraîner, toujours selon le franchisé, la nullité du contrat. En outre, l’annexe qui fixe l’étendue de la non-concurrence « n’englobe pas le territoire » du pays étranger concerné par le litige.

      La cour d’appel le condamne pour développement d’un réseau concurrent après la fin de son contrat

      Par son arrêt du 17 septembre 2020, la cour d’appel de Lyon « confirme en tous points » la décision du juge de l’exécution en date du 23 janvier.

      Pour les magistrats, bien que le franchisé ait invoqué le « caractère imprécis » selon lui de l’ordonnance de référé du 7 juin 2018, il « ne pouvait se méprendre » sur le fait qu’il devait cesser immédiatement ses activités similaires à celle du franchiseur à travers ses différentes sociétés (qu’elles soient situées en France ou ailleurs). Comme il ne l’a pas fait, c’est « à bon droit » que le juge de l’exécution l’a condamné à 30 000 € d’astreinte le 23 janvier 2020.

      Et comme il continue à ne pas le faire et à développer son réseau concurrent « qui compte maintenant 11 points de vente », alors que son contrat a expiré en février dernier, la cour le condamne à une nouvelle astreinte (de 3 000 € par jour cette fois) pour violation de la clause post-contractuelle de non-création de réseau.

      Un délai d’exécution de 30 jours à compter de la signification de l’arrêt lui est accordé afin qu’il se conforme à ses obligations. « La mesure courra jusqu’au 10 février 2022, date de la fin de l’interdiction contractuelle », conclut l’arrêt.

      Références de la décision :

      Cour d’appel de Lyon, 17 septembre 2020, n° 20/01017