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      Se lancer en franchise : une perspective de reconversion

      Dernière mise à jour le 1 mars 2023

      Passer du salariat à l’entrepreneuriat grâce à la franchise : c’est le parcours de trois franchisés sur quatre. Parce que le soutien d’un réseau est une aide précieuse pour monter son affaire et, dans un cas sur deux, se lancer sur un nouveau secteur.

      Intérieur de magasin franchisé à l'enseigne Carrément FleursVenu de l’industrie automobile, où il était agent de maîtrise, encadrant une équipe d’opérateurs, Laurent Chauvron est aujourd’hui chef d’entreprise franchisé sous enseigne Carrément Fleurs à Douai, dans le Nord. Quand on lui demande quel a été l’élément déclencheur qui lui a donné, en 2014, envie de se lancer, voici sa réponse : « Cela peut faire sourire, mais le déclic m’est venu tout bêtement, en allant acheter des fleurs ! À l’époque déjà, je voulais créer une entreprise et travailler pour moi. Banalement, j’ai reçu une invitation à la dernière minute et je me suis dit : « Je ne vais pas arriver les mains vides ». Et on arrive avec quoi ? Des fleurs ! C’est alors que j’ai un petit peu regardé la boutique dans laquelle j’étais, et je me suis dit : « Tiens, je vais me pencher sur le secteur de la fleur ! » »

      Ce témoignage illustre deux aspects importants du modèle de la franchise : d’une part, ce dernier « offre des perspectives de reconversion à ceux qui décident de se lancer », comme le souligne la 18ème enquête annuelle de la franchise Banque PopulaireFédération Française de la Franchise. En effet, 76 % des 400 franchisés interrogés dans le cadre de cette étude étaient salariés avant de monter leur affaire. D’autre part, cette formule donne tout simplement aux porteurs de projet la possibilité de changer de métier : ainsi, « un franchisé sur deux a changé de secteur par rapport à son activité précédente », pointe la même étude.

      Les exemples de reconversions réussies sont nombreux, mais aussi variés. Infirmière, puis commerciale et formatrice auprès des professionnels de santé pour une entreprise de matériel médical, Valérie de la Marnierre est devenue en 2015 franchisée du réseau Dietplus à Marmande, dans le Lot-et-Garonne. « Je faisais beaucoup de kilomètres, je portais du matériel, j’ai eu des problèmes de dos et il a fallu que je cesse mon activité commerciale : il fallait que je me sédentarise, raconte-t-elle. Je me suis dit : « Pourquoi pas continuer à prendre soin des autres, pourquoi pas continuer dans le domaine du management ? ». Donc je me suis tournée vers la franchise en me disant qu’elle apportait, quand même, une certaine sécurité, dans le sens où on bénéficie de l’expérience du franchiseur, de tout un soutien logistique… »

      Trois franchisés sur quatre étaient des salariés

      Magasin franchisé sous enseigne Cash Express à VireOn pourrait encore citer de nombreux exemples : responsable du secteur multimédia et électroménager en grande distribution, Alexis Mouron a ouvert en 2021 un magasin Cash Express à Châteaudun, en Eure-et-Loir. « Souhaitant donner un nouveau souffle à ma carrière tout en continuant à travailler les produits que j’aime, je me suis donc tourné vers l’entrepreneuriat, et plus précisément vers le marché de l’occasion, raconte ce dernier. Je voulais continuer à évoluer, mais tout en restant sur le secteur non-alimentaire et principalement sur les nouvelles technologies, le multimédia, l’électroménager, l’informatique… La seule solution, c’était de me diriger vers l’entrepreneuriat et de créer ma propre société. » Ancien responsable d’exploitation 15 ans chez La Redoute, David Vandekerckhove a, lui, choisi de devenir adhérent de l’enseigne Roady, et exploite aujourd’hui deux centres auto en Bretagne. « Je me suis posé la question : « Est-ce que je continue à être salarié, à avoir un confort ou est-ce que je prends le choix de vivre ma propre expérience et de performer ? », se souvient-il. J’ai très vite fait le choix de Roady parce que je voulais être un chef d’entreprise indépendant. »

      Consultant chez TGS France, François Peltier le confirme : la franchise est une bonne solution pour les salariés qui souhaitent créer leur entreprise : « Entreprendre est toujours un acte délicat, souligne-t-il. On part au large, on perd les repères qu’on avait en tant que salarié, cette appartenance collective à une organisation. Mais entreprendre en franchise est une voie intermédiaire pour entreprendre, car on rejoint un autre modèle de fonctionnement collectif, même s’il y a une prise de risque dans le fait de quitter le salariat. Certains candidats ont besoin de sécuriser psychologiquement leur projet par cette appartenance : la franchise permet de faire cette bascule ».

      « Se lancer en solo, c’est très long et très compliqué, complète Alexandre Germain, responsable pôle franchise chez Odyssée RH. Il faut réfléchir à tout : au mix marketing, à la communication… L’avantage de la franchise, c’est que tout est transmis au départ avec la formation initiale et que par conséquent, le démarrage est beaucoup plus rapide. »

      Passer de salarié à franchisé : oui, mais…

      Alexandre Germain, Responsable Pôle Franchise, Odyssée RH
      Alexandre Germain, Responsable Pôle Franchise, Odyssée RH

      Mais est-ce toujours une bonne idée de se lancer en franchise quand on n’a jamais été entrepreneur auparavant ? Oui, à certaines conditions, estiment les experts : « La franchise permet de se reconvertir, de changer de métier et d’accéder à des savoirs qu’on l’on n’a pas, résume Alexandre Germain. Mais cela reste un changement de vie : on n’aura plus la même sécurité que lorsqu’on était salarié et il faut aussi accepter le fait que, pendant six mois à un an, on ne va pas pouvoir se payer pour faire fonctionner son entreprise ». « Attention à l’idéalisation, met en garde, quant à lui, François Peltier. On voit beaucoup de problèmes psychologiques inhérents aux succès et aux échecs, car un franchisé qui se lance se rémunère très peu au démarrage. »

      La question qui se pose alors est de savoir si la franchise convient à tous les profils de salariés souhaitant entreprendre. Pas forcément, répond Alexandre Germain : « En franchise, on est sur l’application d’un concept, donc cela ne convient pas à tout le monde : il faut avoir l’esprit réseau pour fonctionner. Il ne s’agit pas de rester seul dans son commerce, mais d’écouter la tête de réseau, l’animateur, d’échanger avec les franchisés etc. Quelqu’un qui est juste dans son activité mais ne sait pas écouter les autres ne va pas fonctionne ».

      Cette analyse est partagée par François Peltier : pour le consultant en effet, « il existe un antagonisme entre le désir d’émancipation par la création d’entreprise, qui est une forme de transgression (« Je deviens mon propre patron »), et le fait d’accepter qu’un autre patron m’impose des règles et m’envoie un salarié pour me contrôler. Les profils plus créatifs risquent de se retrouver dans une situation de frustration car ce sont ceux qui acquièrent plus rapidement le savoir-faire et s’en émancipent le plus rapidement ».

      …pas dans n’importe quelles conditions

      Comment un salarié en reconversion peut-il s’assurer qu’il est fait pour la franchise ? « Avant de se lancer, il faut réfléchir sur soi-même, conseille François Peltier. Quel est mon ressort, quel est mon besoin ? Il ne faut pas s’emballer dans une opportunité, mais au contraire bien choisir son franchiseur : est-ce que les valeurs du réseau me correspondent ? » « La franchise est un mariage : il faut que le concept me convienne et soit capable de me motiver demain pour me lever tous les jours, qu’il y ait une bonne entente avec la tête de réseau et que j’aie envie d’avancer avec elle, précise pour sa part Alexandre Germain. Mon conseil, c’est d’aller au-delà du franchiseur et des chiffres annoncés par ce dernier : il faut aussi échanger et valider votre projet avec d’autres franchisés plus ou moins récents dans le réseau, sur leurs difficultés, leur quotidien… »

      S’assurer que l’entourage familial du porteur de projet (conjoint, enfants) adhère au projet de création en franchise, tout en ayant conscience de tous les changements que ce passage du salariat à l’entrepreneuriat va entraîner, est aussi un point important. « C’est un projet de vie : il faut que le conjoint, la famille soit ok sur le principe du stress lié à une nouvelle activité, à des risques nouveaux, à des revenus qui ne vont pas tomber tout de suite, à la charge mentale que tout chef d’entreprise connaît : il y aura des problèmes professionnels à gérer même le soir et le week-end !, prévient Alexandre Germain. Donc il faut avoir tout ça en tête : je dois m’assurer auprès de mes proches que cette nouvelle vie leur convient aussi. » De fait, si le candidat ne s’en inquiète pas, le (bon) franchiseur aura à cœur de vérifier cette adhésion, dans le cadre de la validation d’une candidature, complète François Peltier. « Sinon, des désaccords fondamentaux risquent d’apparaître entre conjoints dans le projet, souligne le consultant. Beaucoup de familles ont explosé à cause d’un projet en franchise, soit parce que le conjoint n’était pas d’accord, soit parce que l’équilibre entre vie familiale et vie professionnelle a été bouleversé ».

      Avis d’expert : « Méfiez-vous des franchiseurs qui ne vous « cuisinent » pas suffisamment »

      François PeltierFrançois Peltier, directeur associé de ACTAS Consultants (Bordeaux), consultant chez TGS France

      « La création d’entreprise est un projet familial qui n’implique pas que le signataire donc, dans le processus de recrutement, le franchiseur doit s’assurer que l’environnement familial adhère au projet.

      Regardez aussi le degré de « dissuasion » qu’utilise le franchiseur dans le cadre de votre recrutement : cela veut dire qu’il vérifie que vous avez toutes les chances de réussir. La « sévérité » d’un franchiseur dans le recrutement est un bon signe. Sinon, la partie économique risque de prendre le pas sur la partie psychologique : c’est toujours une tentation.

      C’est pourquoi je tiens à alerter les candidats : s’ils ne sont pas validés, questionnés, testés… qu’ils se méfient : c’est mauvais signe. »