Fermer
Secteurs / Activités

      Stéphanie di Fusco, Directeur National Franchise, In Extenso - Interview du 8 octobre 2021

      Interview
      8 octobre 2021

      Directeur national du marché franchise et commerce organisé pour le réseau d’experts-comptables In Extenso, Stéphanie Di Fusco explique comment évaluer la rentabilité d’un concept et bien choisir son réseau en cette rentrée 2021, à propos de laquelle elle se montre plutôt confiante.

      Les habitudes de consommation ont changé. Nous avons un gros travail à réaliser sur les prévisionnels !

      Stéphanie Di Fusco,Directeur national du marché franchise et commerce organisé pour le réseau d’experts-comptables In ExtensoComment se porte l’activité franchise pour In Extenso ? Avez-vous beaucoup de candidats franchisés à accompagner en ce moment ?

      Cela dépend du secteur bien sûr, mais, oui, nous avons de très bons flux de candidats à la franchise et accompagnons de nombreuses ouvertures, contrairement à ce que l’on aurait pu craindre. Des candidats sérieux qui ont pris le temps de la réflexion pendant les différents confinements, puis qui ont effectivement décidé de se lancer. En fait, l’amélioration par rapport à 2019 date même de la fin de l’année 2020 et n’a fait que se confirmer depuis. Parmi les secteurs les plus actifs : la restauration rapide et à table, les cuisinistes, toutes les activités qui gravitent autour de l’habitat et, par voie de conséquence, l’immobilier.

      Tous les experts-comptables du réseau In extenso peuvent-ils conseiller des candidats à la franchise ?

      Nous sommes une équipe de 5 personnes au service des 250 experts-comptables et des 5 000 collaborateurs de nos 250 agences qui maillent le territoire. Nous avons un référent par région. Nos experts sont formés à la franchise et spécialisés à la fois par secteur d’activité et par enseigne. Nous orientons bien sûr les candidats vers eux en fonction de leur proximité géographique.

      « Une chose est sûre : les consommateurs ont pris de nouvelles habitudes maintenant bien ancrées. »

      Après dix-huit mois de crise sanitaire avec les conséquences que l’on sait sur la consommation, diriez-vous que, globalement, les réseaux de franchise sont revenus à une situation normale ?

      Cela dépend des secteurs. Certains sont encore dans une situation délicate. D’autres ont repris une vitesse de croisière mais ne sont pas encore revenus à leur niveau d’activité d’avant la crise.

      Une chose est sûre : les consommateurs ont pris de nouvelles habitudes maintenant bien ancrées. Résultat, en restauration par exemple, la livraison et la vente à emporter qui n’entraient hier que pour une faible part dans la composition du chiffre d’affaires, constituent aujourd’hui non seulement un moyen de compenser l’activité à table quand elle est interrompue mais une source durable de chiffre d’affaires additionnel.

      L’importance prise par le digital dans nos vies a également des conséquences. Désormais dans l’immobilier, où les acheteurs utilisent de plus en plus les visites virtuelles d’appartement ; chez les cuisinistes, où les agenceurs recourent aussi de plus en plus aux réunions à distance, les délais ont raccourci, ce qui entraîne une augmentation de l’activité.

      Par ailleurs, dans un secteur impacté comme les salles de sport, on constate une tendance positive depuis leur réouverture.

      « Je pense que la vie normale va reprendre assez rapidement. »

      Comment la situation va-t-elle évoluer selon vous à court terme avec la fin du fonds de solidarité au 30 septembre et les difficultés que posent le pass sanitaire dans les centres commerciaux et ailleurs ?

      Concernant le fonds de solidarité, voilà déjà quelques mois que les critères d’acquisition étaient devenus un peu plus rudes. Quant au pass sanitaire, il n’est pas certain qu’il sera prolongé au-delà de novembre et il s’accompagne aussi de bons signaux comme la fin ici et là de l’obligation de porter le masque. Certes, la fréquentation dans les malls a baissé entre 15 et 40 % selon les sources, mais on ne sait pas jusqu’à quand et on peut espérer que les professionnels qui se mobilisent sur le sujet parviendront à se faire entendre. Je pense que la vie normale va reprendre assez rapidement.

      Vous attendez-vous dans les semaines et les mois qui viennent à un afflux de candidats à la franchise et de projets ?

      Oui, parce que beaucoup de salariés veulent se mettre à leur compte mais pas tout seuls. Et même chez les indépendants, beaucoup se sont sentis très isolés pendant cette crise et se posent des questions.

      La crise n’a pas fait de dégâts parmi les enseignes de franchise ?

      A la marge seulement.

      « Aujourd’hui, la structure du modèle économique a complètement changé dans certaines activités en franchise. »

      Parmi les critères de choix d’un réseau, êtes-vous d’accord pour dire qu’aujourd’hui plus que jamais, c’est la rentabilité du concept pour les franchisés qui doit être avant tout prise en compte ?

      Conseils-DevenirFranchise-BusinessPlanC’est la base même de la franchise : on ne peut pas franchiser des pertes, le concept doit impérativement être rentable. Mais aujourd’hui, il est devenu indispensable d’envisager de nouveaux scénarios. Si je prends encore l’exemple de la restauration, auparavant les emballages ne représentaient qu’une charge minime, aujourd’hui, avec la livraison et la vente à emporter, on assiste à un renforcement important de ces postes. La structure du modèle économique a complètement changé. Nous avons un gros travail à faire là-dessus pour les prévisionnels. De même l’étude de marché est devenue une obligation. On ne peut pas en faire l’économie.

      Mais n’est-ce pas précisément plus difficile que jamais de mesurer cette rentabilité future à la lumière de l’année 2020 si atypique ? Comment faites-vous aujourd’hui pour aider les candidats que vous accompagnez sur ce point crucial ?

      Nous regardons avant mars 2020 comment se comportait l’activité dans le réseau concerné en vitesse de croisière. Puis, avec précaution, comment elle a réagi depuis. Et nous pondérons ensuite en fonction de l’évolution du concept. Mais attention, dans certains secteurs comme les cuisines où l’immobilier, les enseignes sont restées sur les mêmes niveaux. Parfois, les chiffres d’affaires ont même augmenté.

      L’activité du premier semestre 2021 peut-elle constituer un indicateur ?

      Non. On n’est toujours pas revenu à un schéma classique.

      « Avec les nouvelles enseignes, la prise de risque des futurs franchisés peut être un peu différente. »

      Comment procédez-vous pour les nouvelles enseignes qui n’ont pas d’historique ?

      Nous exploitons au maximum les données contenues dans le DIP, nous regardons les chiffres d’affaires des succursales et nous travaillons avec leurs ratios-type. Nous demandons aussi au candidat de faire des recherches complémentaires et l’avertissons que sa prise de risque peut être un peu différente.

      Et si l’enseigne n’a pas d’établissement pilote ?

      Nous lui conseillons de ne pas y aller. Sauf exception.

      A ce propos, y a-t-il des types d’activité, des concepts nouveaux de franchises qui vous surprennent, voire qui vous inquiètent en ce moment ?

      Ces dernières années, on a vu les difficultés qu’ont rencontré les concepts de cigarettes électroniques et de soins dentaires. Tous n’ont pas duré ! Mais aujourd’hui, non.

       « Pour l’étude de marché, on ne peut pas se contenter de compter soi-même les flux de clientèle et de se rendre chez deux ou trois concurrents. »

      Diriez-vous que les états de marché local délivrés dans les DIP par les franchiseurs sont souvent utiles aux candidats pour évaluer la rentabilité future de leur projet ?

      Ils sont bien faits en général. Ils donnent au candidat des indices significatifs sur ce qui se passe dans sa zone de chalandise. Mais une véritable étude de marché est indispensable.

      Pour cette étude de marché, il faut, selon vous, obligatoirement s’adresser à une société spécialisée ?

      Devenir-Franchise-Etude-Marche-PrevisionnelsOui. On ne peut pas se contenter de compter soi-même les flux de clientèle et de se rendre chez deux ou trois concurrents. C’est utile pour compléter la démarche. Mais cela ne constitue pas une étude de marché. Pour une bonne étude, il faut se rapprocher de professionnels qui disposent eux de bien plus de données.

      Certains affirment qu’il vaut mieux éviter justement de s’adresser pour les études de marché aux sociétés partenaires du franchiseur, vous n’êtes pas de cet avis ?

      Non. Il existe d’excellents spécialistes, comme Territoires et Marketing, qui ont de l’expérience, qui ont effectué parfois pour une enseigne des dizaines d’études. Ils seront forcément beaucoup plus pertinents qu’une société non spécialisée. En outre, le franchiseur, à moins qu’il ne s’agisse d’un voyou, n’a aucun intérêt à préconiser des partenaires incompétents.

      Que faites-vous face à un candidat à la franchise qui ne dispose pas pour son projet d’une véritable étude de marché ? Qui n’en a pas fait ou pas fait réaliser ?

      Nous lui conseillons vivement de le faire.

      Les candidats que vous accompagnez ont-ils tous rencontré des franchisés membres du réseau qu’ils envisagent de rejoindre ?

      Ils le font et on les y encourage. Il faut aussi aller voir le développeur sur sa zone, aller au siège, rencontrer le staff.

      Vos experts participent-ils à la confection de certains DIP ?

      Non, c’est le domaine des avocats spécialisés en franchise ou des consultants. Franchise Management par exemple le fait très bien.

      « Il faut aussi évaluer la qualité de l’accompagnement délivré par le franchiseur et sa capacité à faire évoluer son concept. »

      Quels sont, pour un candidat à la franchise, les autres critères de choix d’un réseau ?

      L’activité, bien sûr. Il faut savoir si elle fonctionne, si elle va vous plaire et si elle sera résiliente en cas de nouvelle crise. Si elle a de l’avenir ou s’il ne s’agit que d’un « one shot ». Aujourd’hui par exemple, on voit fleurir énormément de magasins qui vendent des vélos. Il y en a vraiment beaucoup. Combien en restera-t-il à terme, on peut se poser la question.

      Il faut aussi évaluer la qualité de l’accompagnement délivré par le franchiseur, que ce soit en vitesse de croisière ou en cas de coup dur.

      Il faut enfin se poser les bonnes questions sur soi-même : savoir si l’on souhaite devenir totalement opérationnel ou simplement investisseur, travailler seul ou diriger une équipe, être à terme mono ou multisite, et dans quel secteur géographique. Cela aide bien à sélectionner une enseigne.

      Comment savoir si le franchiseur sera capable demain de faire évoluer son concept ? De mettre à jour son savoir-faire ?

      Il faut regarder dans le rétroviseur et voir s’il l’a fait avant mars 2019 et bien sûr depuis. On le sait, certaines enseignes ont plus peiné que d’autres devant le véritable cas d’école que leur a posé la crise sanitaire. La question n’est pas de savoir si l’activité a été considérée comme essentielle ou pas, mais comment le franchiseur a réagi. Car, secteur par secteur, tout le monde était placé face à la même situation. On peut donc comparer ! Mais je note qu’aucun franchisé parmi ceux que nous accompagnons, ne m’a affirmé s’être senti seul.

      Les candidats à la franchise vont-ils à votre avis dans la période qui vient se montrer suffisamment vigilants et sélectifs ?

      Je le crois. Ils vont recourir davantage aux études de marché, se montrer plus exigeants. Je l’espère et le leur conseille en tout cas. Je le dis aussi aux franchiseurs d’ailleurs : ce n’est pas parce qu’il y a eu ici et là moins d’ouvertures pendant deux ans qu’il faut pour autant être moins sélectifs.

      -En savoir plus sur cette spécialiste